40 ans, une corde à sauter et moi…

Sport

Tout a commencé sur Twitter… 

Tout a commencé sur Twitter…

(…)

Une discussion avec Eva, Yves et Marco. Ce matin. Une sombre histoire de corde à sauter. J’ai demandé à Eva de raconter. Et à Yves de la raconter à sa manière, aussi, avec un dessin. Et voilà le(s) résultat(s). Je vous avoue que je n’aime rien plus que ces impromptus qui naissent sur le net. Place à Eva et sa corde à sauter. Et merci Yves.

Je ne sais pas vraiment comment tout ça a commencé.

Une association d’idées. D’images pour être exactes. Et mon cerveau qui accumule des données pendant plusieurs semaines.

Le film Ali sur Arte, ces abdos d’hommes ostentatoires, cette plaque de chocolat que j’ingurgite devant l’écran, la télécommande posée sur le dernier numéro de Vital proposant des recettes miracles pour avoir un corps parfait, et mes baskets qui traînent sous mes yeux.

Un beau bordel dans mon cerveau…

Le lendemain, parc Monceau pour un séance de jogging.

10km au milieu des poussettes, trottinettes et autres coureurs.

Et mes yeux qui s’égarent sur un garçon et… Sa corde à sauter.

À force de regarder mes pompes en courant, je n’ai jamais fait attention à ces fous de la corde qui s’agitent sur place dans un coin du parc.

Deux tours plus tard, il est toujours là. Le bruit de la corde, ses bras serrés le long de son buste, la sueur sur son front, la corde presque invisible tellement elle brasse l’air à grande vitesse.

Quelques jours ont passé. Je m’engouffre dans un magasin Décathlon pour acheter une paire de basket. Et évidement, comme à chaque fois, je suis ressortie sans chaussure, mais avec un énième tee-shirt, 3 paquets de barres d’Ovolmatine, des chaussettes (parce que je n’ai pas résolu le mystère de la chaussette orpheline comme tout le monde) et… une corde à sauter.

Noire. J’ai évité la rose.

Le monsieur de Décathlon l’avait mise en tête de gondole. Mon cerveau a buggé : Ali, les tablettes de chocolat, corps parfait, le garçon du parc Monceau et me voilà à la caisse avec ma corde à sauter.

Chez moi, séance bricolage façon Kinder surprise ou meuble Ikea (je vous laisse le choix). Objectif : mettre ce satané engin à ma taille. Dévisser une des poignées, couper la corde (j’ai utilisé un couteau japonais digne d’une hache, sachez le) et se dire qu’il valait mieux essayer ce nouveau sport à l’extérieur. À défaut de démonter l’appart et surtout voir le plancher s’effondrer chez le voisin.

Retour au parc donc.

Pour 10km de footing d’abord. Du jazz plein les oreilles et des questions existentielles. Saurais-je faire de la corde à sauter ? Combien de temps vais-je tenir ? Sauts de cabris ou petits bonds tout simples ? Et si je n’y arrivais pas, que faire de cette corde ?

Non, pitié, pas de pensée scabreuse. Je dois rester concentrée.

 Dans mes souvenirs de gosse, j’étais pas une as. Ni de la corde à sauter, ni de l’élastique (pour ceux qui ne savent pas ce qu’est l’élastique, laissez tomber).

Ne me dites pas que c’est comme le vélo « on oublie pas ». Parce que justement le vélo, j’oublie régulièrement… La preuve, il y a encore trois semaines, quand ma tête est venue percuter ce parcmètre qui s’était mis sur ma route (bilan médical : nez fêlé, traumatisme crânien).

Je pensais à tout ça en courant, tentant de retarder le moment fatidique de « j’ai 40 ans et je vais faire de la corde à sauter ».

Il est 18 heures, pas grand monde en ce jour d’août.

J’ai trouvé un coin planqué dans le parc.

Premier saut, la corde se fige dans mes pieds.

Deuxième saut, troisième et…

La corde qui ne redescend pas vers le sol.

La rebelle ! Elle a préféré se nicher dans la branche de l’arbre sensé me protéger des regards indiscrets…

Entre des envies d’insultes et un fou rire qui se dessine au fond de ma gorge, d’un coup sec, la revoilà à mes pieds.

Et moi, me voilà surtout condamnée à faire de la corde à sauter sur l’esplanade bétonnée dénudée d’arbre. Comme tout le monde.

Une fille enchaîne de petits sauts désynchronisés, casque sur les oreilles. Et une grâce absolue.

A ses côtés, un garçon musclé imite Ali.

Et moi, pauvre gourde avec ma corde à sauter, à maudire Arte, Vital, Décathlon et toutes ces théories sur le culte du corps…

Mens sana in corpore sano…

 Tu parles…

Le ridicule ne tuant pas, je m’élance.

Trois sauts. La corde qui échoue dans mes chevilles.

Serrer les dents, ignorer le sourire vaguement moqueur du garçon, penser à mes abdos en train de se former sous mon tee-shirt (oui et alors ? Laissez moi y croire).

Et c’est parti.

Oui, oui…

Ne riez pas.

J’ai réussi.

Le bruit de la corde, les pieds qui se détachent légèrement du sol, les poignets qui bougent à peine, les perles de sueur qui glissent le long de mes tempes…

Youpi, je fais de la corde à sauter ! J’ai 4 ans et je vis!

Un feu d’artifice de sensations et de satisfaction.

 Un moment délicieux qui a duré…10 minutes.

 Parce qu’au bout de 10 mn, j’ai tout compris.

Compris que mon corps possédait des muscles que je n’avais jamais sollicités. Du bout de mes orteils jusqu’au creux des mes épaules.

Compris pourquoi cette pratique, c’est bon pour le cardio comme a dit le monsieur de Décathlon, et redécouvrir le sens de  l’expression « mon cœur s’est emballé ».

Compris pourquoi les boxeurs ont des abdos sculptés.

Compris pourquoi, surtout, il est déconseillé de courir une heure avant une séance de corde à sauter (sauf si vous êtes un athlète de haut niveau).

 A bout de souffle, j’ai déserté le bout de bitume du parc Monceau, traînant ma corde, ma fatigue et mes courbatures… Me jurant que je parviendrai – un jour – à dompter cet engin de malheur.

Tiens, si j’allais sauter (à la corde)… ?

18 Commentaires

  1. J’ai suivi votre conversation ce matin sur #Tweeter !
    Et….Surprise, le billet et l’illustration sont là ! Hâte, j’avais.
    Je me suis beaucoup amusée en lisant cette aventure de La corde à sauter. Merci parce que, rapidement j’ai retrouvé mes 7 ans en lisant ce billet !
    Puis, rapidement mes 40 et quelques sont revenus avec les courbatures de la Sportive Eva !
    Et le sourire, à la fin, avec le dessin d’ Yves !
    Merci d’avoir rendu mon dimanche soir plus gai que de coutume.

  2. J’adore cette complicité entre Yves et toi… Mais le dessin est invisible dans l’épicerie… C’est terrible ! Ou est-ce moi qui ne sais plus faire fonctionner un ordinateur ? Bon là nous allons dîner ici, une merveille ! http://www.restaurant-vietnamien-labaule.fr

  3. C’est toi….

  4. Sympa !!!!!! Un sacré bond d’âge en âge
    en arrière délicieux ! 🙂

  5. J’ai adoré !!! Merci pour ce sourire du dimanche soir!

  6. Super génial. Plein de souvenirs. Promis demain j’y mets. Flûte pas de. Corde,

  7. Holy Shit, Guy c’est bien possible la connexion Wi-Fi à La Baule est un peu nulle… Je vais aller voir de nouveau ! Le texte d’Eva est épatant, bravo à elle !

  8. Ça marche… Merci !

  9. Vous verrez dans ce clip un belle apologie de la corde à sauter : http://youtu.be/zoMYU_nOGNg

    (Dans le cadre de leur entraînement sportif, mes kids font également des exercices de corde à sauter. Je n’ai jamais tenté de faire une compétition avec eux : je sais que j’ai perdu d’avance. En saut simple, c’est-à-dire sans faire de « croisé-décroisé », leur record doit se situer aux alentours de 200 sauts sans trébucher…).

  10. Très sympa ce billet !!
    J’avoue m’être reconnu à chacune de tes lignes Eva !
    Mais moi, j’ai laissé tombé… je garde mes abdominables !
    Merci pour ce joli sourire !

  11. La « culture » de la corde à sauter est universelle.
    On la retrouve partout et ses origines bien que difficilement datables sont très anciennes.

    On en a même fait un sport à part entière « Le Double Dutch » né à New York et largement popularisé dans les quartiers pauvres de la Grande Pomme notamment par les communautés hispaniques et afro-américaines. Il y a aussi des compétitions de « Jump Rope ».
    Nécessitant peu de moyens mais développant les compétences physiques et artistiques, ce sport dépasse les frontières des USA pour se diffuser partout remettant à la mode cette bonne vieille corde à sauter y compris chez les moins sportifs.

    Maintenant place aux pros:

    Version Double Dutch (la musique est à hurler mais la démonstration concise et efficace):

    http://youtu.be/A2UBcyc6yW8

    Version classique avec une charmante hongroise(oui, j’appâte de manière indigne mais qu’est ce qu’on ferait pas pour encourager la pratique régulière du sport?):

    http://youtu.be/ofOJoK-eEWo

    On fait des matchs avec ma fille où je finis inévitablement rouge tomate à chercher l’air comme un poisson hors de l’eau mais on rigole bien pour pas un rond et mes fesses me disent merci régulièrement.

    Merci pour ce texte qui ne peut que faire sourire tant il nous ressemble.

  12. Pourquoi le parc Monceau ? Guy a déménagé ?

  13. Euh … Lovely ? On se réveille ?

  14. Si un jour vous voulez plus de lecteurs sur le créneau apolitique, je pense qu’il y a une publication qui adorerait avoir un blog avec ce genre de posts :

    http://www.gqmagazine.fr/

    En plus vous y auriez une charmante voisine :

    http://www.gqmagazine.fr/sexactu

  15. J’ai commencé la corde à sauter quand j’étais « au » primaire et à la maternelle. des cordes en plastques aux couleurs fluos… on chanait des comptines pour enfants en sautant et on en faisait des concours à la récrée!!! J’ai continué quand j’étais sportive de haut niveau et qu’elle était indispensable pour les échauffements et les séances de PPG…
    et j’ai donc continué à bientôt 30 ans pour changer des séances de running ou compenser un cours de Zumba séché…
    seul hic, pas forcément très bon pour les migraineuses… trop de rebonds…

  16. Oui, et aujourd’hui il y a même un site internet qui est spécialisé dans la vente de cordes à sauter : http://www.Sautiller.com 🙂

Soumettre un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

8 Sep, 2013

Épicerie ouverte

Prenez votre temps…

Conserves

Images

« Y’en a un peu plus, je vous l’mets quand même ? »

Miller, les juifs, la France, la morale, le fond et la forme

Miller, les juifs, la France, la morale, le fond et la forme

Tout a commencé avec une tribune de Gérard Miller publiée dans Le monde, titrée "Jamais autant de juifs français n'ont perdu à ce point leur boussole morale". Pour moi, rien n'allait dans cette expression "juifs français". Reprenant l'écrit fulgurant de mon regretté...