Déjà Vu

Again

v1.bTsxMTIwNzgxMztqOzE3MDcyOzIwNDg7MTIwMDsxNjAwC’est mon sentiment.
Et je ne sais pas s’il est intéressant.
C’est mon sentiment.
Et je ne sais pas s’il est intéressant.

(…)

Il y a un peu plus de deux ans, j’aurais écrit, ici ou ailleurs, et entamé mon propos ainsi : « C’est un sentiment intéressant ».
Maintenant, je ne sais plus.
Fin du préalable.

Venons-en à ce sentiment pas forcément intéressant…

Depuis deux saisons, je fais face, chaque matin de la semaine, sur France Info, aux politiques les plus éminents. Celles et ceux qui dirigent ce pays ou celles et ceux qui aspirent à le diriger (sauf François Hollande qui n’est pas encore venu dans cette tranche).

Depuis novembre 2015, je suis même entré dans l’interview, entre 7h45 et 8h, et je peux, à loisir, poser aux élites du pays toutes sortes de questions.

Ce poste d’observation tout à fait privilégié, auquel il faut ajouter les quelques minutes de off avant l’entretien, me conduisent à quelques « impressions ».

Je ne sais absolument pas ce qui va se passer dans moins d’un an.
Rien. Nada. Nothing.
Je n’ai strictement pas la moindre idée de la suite du « film » et tous les éditorialistes ou journalistes politiques qui prétendent la « spoiler » sont des vantards ou des menteurs ; ou les deux.

Ce qui me rassure sur mon incompétence, c’est que les politiques que nous recevons n’en savent pas davantage que moi.
Ils sont aussi largués, même si nombre d’entre-eux passent leur temps à prétendre au micro – et hors micro – que Marine Le Pen sera présente au second tour de l’élection.
Je ne suis absolument pas certain de cela.

En revanche, ce que je remarque chaque jour, c’est que les premiers rôles sont sûrs qu’ils auront une vraie place et que les seconds couteaux sont tout aussi certains que leur voix comptera. Quant aux politiques de moindre renommée, ils sont assez certains, vu le « bordel » général, qu’ils vont exister plus que d’habitude, eux aussi.

Mais l’essentiel n’est pas là.

Ce qui est difficile à endurer pour quelqu’un de plus de cinquante ans (comme pour une ou un quadra, je n’en doute pas…) c’est le discours répétitif et lassant général (de l’extrême gauche à l’extrême droite en passant par absolument tous les autres courants politiques) sur l’ «essoufflement de la politique», la « fin du système », la « cinquième république à bout », le « ras le bol général », la nécessité de « renouveler la politique » et toutes les propositions tristement banales qu’égrènent les politiques pour « changer la donne », « rebattre les cartes », « réenchanter la politique »…

Ce diagnostic, comme les éléments de langage éculés déployés pour l’asséner, sur un ton plus ou moins convaincu/cant, n’ont pas loin de vingt ans et ceux qui l’énoncent étaient déjà là, alors (journalistes inclus).

La seule nouveauté c’est que ceux – politiques et journalistes – qui traitaient de « populistes », de « poujadistes » les politiques ou les observateurs qui dénonçaient, il y a vingt ans, la décomposition de la politique française disent aujourd’hui la même chose et pourfendent le « système » qu’ils protégeaient alors. Touchés par la grâce, ils veulent désormais tout « rénover du sol au plafond », en tentant de nous faire oublier qu’ils ont assassiné méthodiquement tous les « rénovateurs » (les vrais et les faux) qu’ils ont croisés.

Cette situation – la leur, la mienne, la notre – me rappelle chaque jour l’un de mes films préférés : le Jour sans fin d’Harold Ramis (Groundhog Day) dans lequel Bill Murray interprète Phil Connors, un insupportable présentateur météo, qui voit la même journée – le 2 février – recommencer encore et encore.

Rita: Do you every have déjà vu?
Phil: Didn’t you just ask me that?

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13 Commentaires

  1. et dire qu’il va falloir voter…
    c’est devenu un calvaire.

  2. C’est amusant : c’est à peu près le sujet de la conversation que nous avons eue à table avec des collègues (tout le monde pense avoir un rôle à jouer, la politique c’était mieux avant et tout ça). Je vais leur faire suivre ton billet, tu expliques mieux que moi.

  3. Oui mais en même temps, le pouvoir est entre les mains des multinationales. C est l argent qui mène la danse. Ces fortunes gagnées dans les discounts en vendant de la merde. On est la à subir le recul de toutes nos valeurs et on croit devoir lutter contre le gouvernement mais on se trompe d ennemis

  4. Isabelle, c’est pas compliqué, suffit d’arrêter d’acheter de la merde, et les multinationales feront faillites.
    Le recul des valeurs ? Lesquelles au juste.
    Je crois que ce qu’il faut c’est moins de politique, moins de morale socialiste.

  5. Mais non @nicolas, tu expliques très bien !

  6. DSL j explique tout sur mon blog sur votre prétendu super pouvoir d achat qui ne saurait faire défaut et rendrait les entreprises vertueuses. Donc vous commencez par saccager, vous inondée les marchés et vous attendez que les super consommateurs se rebiffent en faisant tout contre, par ailleurs. La Chine a bien compris d ailleurs qu’ en Europe on achète que de la qualité. En attendant elle a empoché le fric et pris une grande part du pouvoir… Inversement des valeurs car plus c est rentable plus c est merdique et plus c est merdique plus les marchés sont contents. Travailleurs précaires blogspot

  7. Quand Isabelle dit « c’est les multinationales » ou « c’est la Chine », c’est aussi quelque chose qu’on nous sert depuis belle-lurette.
    Ça résonne comme ce qu’on pensait en des temps reculés:
    1) attribuer un rôle crucial à des puissances supérieures voire divines, enfin au dessus de nos têtes, nous rendant fatalistes, inertes, et
    2) le besoin de rendre responsable un peuple voisin mais très différent accusé d’être très barbare, ce qui nous rend destructeurs, ranimant nos forces éteintes précédemment.

    Et si c’était un truc récurrent franco-français plutôt? La confrontation qui jamais n’a cessé? Elle se déguise comme ci ou comme ça et triture nos destinées.
    On en serait à: l’abolition des privilèges, mais du peuple. On sait pas pourquoi.
    Tout le pognon de l’état passe à construire des beaux ministères pharaoniques congelant l’eau vive. Les élus déstructurent et délèguent leurs prérogatives pour devenir du plus petit niveau comme au plus grand des gestionnaires de patrimoine et adopter des principes de DRH optimalisant.

    Merci Guy, pour ce billet, et le doute, c’est la base de l’intelligence! Vous nous montrez que vous doutez et que leurs certitudes sont creuses.

  8. Merci ! L’occasion révée de relire «  »Le dépérissement de la Politique – Généalogie d’un lieu commun » de Myriam Revault d’Allonne (1999). Le sous-titre dit tout, et l’auteure fait remonter cette généalogie à … Démosthène et Péricles, c’est à dire à l’origine de la démocratie!

    Dégainer cet argument, c’est donc rejouer une comédie millénaire. Il y a plus convaincant quand on veut rénover les choses! Et au passage, on alimente la dramatisation et la tension sociale.

    Notre société a bien sûr besoin que de nombreuses choses changent, mais avec cet angle d’attaque, on la fracture encore plus.

  9. L’angle de l’article, si j’ai bien compris, c’est le sentiment de  »déjà vu ».

    C’est aussi mon avis. Le changement dans la continuité disait G Pompidou (de mémoire).

    Pour ma part, il y a une autre formule qui me contrarie depuis bien longtemps, c’est quand un politique nous dit :  »nous devons faire acte de pédagogie ».

    Cette loi ou ce décret est rejeté par les Français ?  »nous devons faire acte de pédagogie ».

    Comprendre : ils sont tellement bêtes qu’ils n’ont surement pas compris.

    Eh bé non, on a très bien compris (Maëstricht, traité constitutionnel etc…)simplement on n’en veux pas.

    Content de vous (re)lire…

  10. Ce qui est difficile à endurer pour quelqu’un de plus de cinquante ans (comme pour une ou un quadra, je n’en doute pas…) c’est le discours répétitif et lassant général (de l’extrême gauche à l’extrême droite en passant par absolument tous les autres courants politiques) sur l’ «essoufflement de la politique», la « fin du système », la « cinquième république à bout », le « ras le bol général », la nécessité de « renouveler la politique » et toutes les propositions tristement banales qu’égrènent les politiques pour « changer la donne », « rebattre les cartes », « réenchanter la politique »…

    Pour moi, ce n’est pas ce discours répétitif qui est difficile à endurer. Parce qu’il est juste, le constat que notre système de représentation est vicié (combien d’ouvriers et d’employés, de précaires et de chômeurs à l’assemblée nationale ?)
    Ce qui est dur à endurer, c’est que ceux qui tiennent ce discours ne font rien pour vraiment changer les choses.
    C’est pourquoi on entend la rue gronder aujourd’hui. Ce qui ne plait pas, bien sûr, aux confrères éditocrates de Guy :
    http://www.acrimed.org/L-editocratie-unanime-haro-sur-les-greves
    Vivement le 4 août !

  11. La cinquième république c’est quand même pas compliqué :

    Le président est élu. Si tout va bien, il a sa majorité à l’assemblée et il conduit la politique qu’il veut (dans le respect de la constitution, 49/3 ou pas).

    Si ca ne va pas à certains, qu’ils votent autrement la prochaine fois et s’il sont majoritaires, ils aviseront.

    Ce que la loi fait, la loi peut le défaire.

    Sorti de là, le pays est ingouvernable, a moins de faire ce que la CGT exige.

    Je n’ai pas voté FH (très loin de là !) mais il est en place et je respecte le vote des Français.

    Et puis, depuis ce quinquennat à la c.., c’est quand même pas dur d’attendre la prochaine échéance.

  12. Allons, allons, Sacha, soyons sérieux. Vous savez très bien que le choix parmi les candidats est limité puisqu’il faut passer par le filtre des partis. Qui plus est dans un système qui fait alterner deux grands partis de gouvernement. Et ces deux partis choisissent comme candidats des hommes et des femmes qui ont peu ou prou le même profil : des bourgeois d’un certain âge, souvent déjà élus par ailleurs, et plutôt issus de catégories socio-professionnelles supérieures. Même le grand parti « de gauche », sensé être proche des petites gens (puisqu’il est de gauche), rechigne à choisir pour les présenter aux élections des ouvriers ou des employés, comme je le regrettais plus haut.

  13. Vingt ans c’est un peu court jeune homme!
    1962-2016, presque pas encore né, tu ne pouvais pas savoir.
    1962 l’établissement du Messie auquel, sous-maître, nous devons toujours nous soumettre. Quelque soit le messie, son délire nous devons abdiquer, renoncer ce que nous sommes sous peine de parjure. Messie ne faisant plus aucune différence entre bergers et agneaux. Agneaux, veaux, bergers ne sachant plus qui est l’autre. Alors ils lisent plus mal que bien les tables effacées.
    Syndrome de la troisième génération, nous y sommes, revenir à l’endroit, à l’instant, ou l’on nous a dépossédé de nous-même. Sans Messie, sans bergers-moutons, sans leurre, sans écriture dans le ciel, sans disciple pour inventer les maux et crimes, les plaies et fractures dont nous devrions souffrir. cette troisième génération a décidé d’être confiante tous ses désirs. Nuit gravement à l’autorité chancelante reste debout.

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