Pourquoi il ne faut jamais jeter les livres

Code

Thomas Fabre (c’est un pseudo) m’a fait passer ce papier par mail. Je l’ai lu et j’ai décidé de le publier…

Thomas Fabre (c’est un pseudo) m’a fait passer ce papier par mail. Je l’ai lu et j’ai décidé de le publier…

(…)

« L’été dernier, j’ai passé les derniers jours de mes vacances chez ma mère. Celle-ci possède une assez grande maison. Et comme toute grande maison qui se respecte, bon nombre de vieux souvenirs y sont conservés.

Une après-midi, ma mère m’a demandé de jeter un œil à un vieux carton qui reposait dans une pièce où s’amoncellent des antiquités. En ouvrant ce carton, je notais rapidement qu’il contenait des illustrés, de très vieux journaux, des livres du début du XXème siècle et quelques autres babioles. Ma mère voulait avoir mon opinion sur la prétendue valeur de ces livres et, en fonction de mon jugement, elle me demandait l’autorisation de jeter une partie de ces bouquins.

Je devinais comme une forme de provocation dans la question de ma mère. Je déteste en effet jeter les livres. Or, je sais très bien qu’elle aussi est peu encline à ce genre d’exercice. Par conséquent, le fait qu’elle me demande la permission de jeter ces bouquins revenait à me renvoyer la responsabilité de conserver pour quelques années encore ces pages imprimées qui dormaient depuis des décennies dans ce carton.

Je m’exécutais alors et commençais l’inventaire. Les feuilles jaunies glissaient entre mes doigts. Je trouvais comme prévu tout une série d’illustrés, puis des livres dédicacés à la plume qui avaient été remis à un de mes grands-pères en tant que lauréat d’un concours organisé par son lycée. Bref, hormis la valeur sentimentale (qui est en soi inestimable), je ne pensais pas faire fortune avec les livres et autres revues présentes dans ce carton. Toutefois, au bas de l’une des piles, je remarquais quelque chose qui m’était familier : il s’agissait d’un vieux Code civil Dalloz.

Étant avocat, je trouvais amusante l’idée de pouvoir ranger ce vieux grimoire, vestige des temps anciens, au milieu de mes codes actuels. Je demandais par conséquent l’autorisation à ma mère de pouvoir l’emporter avec moi à Paris. Pour conclure, et comme elle devait s’y attendre, je lui faisais part de mon souhait de conserver les livres de ce carton même si, comme je l’ai déjà indiqué, je me faisais assez peu d’illusions sur leur valeur marchande.

Étant de retour à Paris à la fin du mois d’août, ce vieux code a ensuite traîné plus d’un mois dans un coin de mon salon avant que je l’emporte finalement un matin d’octobre pour le lieu que je lui avais destiné, à savoir mon bureau qui est, pour ceux qui y pénètrent, une forme de capharnaüm organisé. Là, je l’ai déposé à côté de mes autres codes.

Aussi incroyable que cela puisse paraître, ce n’est qu’au mois de décembre que je fis alors une découverte. Lors d’une conversation téléphonique légèrement ennuyeuse, j’ai repris pour me distraire ce vieux code entre mes mains. Quand soudain quelque chose a frappé mes yeux, quelque chose que je n’avais pas remarqué auparavant. Le code civil Dalloz était daté de l’année 1944. Comprenant rapidement que j’avais certainement entre les mains un document d’un grand intérêt historique, je consultais illico la table des matières à la lettre ‘J’ : il y avait bien un renvoi à des articles pour le terme de ‘Juif’. Je me rendis aux articles concernés et j’ai alors lu d’une traite les pages suivantes.

À la lecture de ces articles, je m’interrogeais en premier lieu sur la difficulté qu’avaient pu avoir des avocats ou des magistrats pour appliquer, si l’occasion leur avait été donnée, des articles de loi aussi absurdes, notamment pour déterminer si une personne relevait ou non de la qualification de juif.

Ensuite, je voyais dans la lecture de ces articles quelque chose de concret et d’immédiat dans la mise en œuvre de la Shoah. Je m’explique : si les camps de concentration ont relevé de la folie humaine dans ses degrés les plus ultimes de furie et de douleur, ces lois représentaient au contraire des formes policées de cette même folie. Or, comme dans une approche névrotique, cette folie avait été obligée de se déguiser sous des atours acceptables pour être validée par une certaine société, par la ‘bonne conscience’ collective d’une France pétainiste.

Je ne m’étendrai pas plus et je laisse à chacun le soin de lire in extenso la loi du 2 juin 1941, les 6 premiers articles sont assez édifiants.

C’est pourquoi je tenais simplement à partager avec vous ces quelques pages. 70 ans après, elles m’ont donné des frissons dans le dos.

A titre anecdotique, je mentionnerai que ce code a dû appartenir à mon parrain qui avait fait des études de droit durant cette période (le code Dalloz de 1944 qui est reproduit ci-dessus a été publié en réalité en 1943 ; il y a, en effet, toujours un décalage entre la date mentionnée sur la couverture et la date de publication).

Ainsi, à l’heure où il est de bon ton de sourire à des propos ou à des gestes soi-disant ‘antisystèmes’, je tiens à affirmer que, conformément à mes convictions les plus profondes, ces personnes dîtes ‘antisystèmes’ doivent avoir le droit de s’exprimer, quitte à ce qu’elles disent d’énormes bêtises (pour rester courtois et poli). Mais dans ce cas, il est aussi mon droit le plus absolu d’opposer à ces personnes ma propre liberté d’expression et je veux par le présent témoignage et, surtout, par la lecture de ces pages rappeler à ces mêmes personnes cette réalité historique incontestable.

 Ce vieux code ne saurait mentir.

 Voilà pourquoi il ne faut jamais jeter les livres ».

Thomas Fabre répondra à vos remarques, comme c’est l’usage dans l’épicerie.

55 Commentaires

  1. Vous avez si bien fait de nous donner à lire cet inestimable courrier de votre ami, ces moments sont précieux car ils nous ouvrent des fenêtres pour comprendre ce monde si difficile si hostile.

    Je suis persuadée qu’il va générer d’autres articles et ouvrages si ceux là n’existent pas encore;

    Rectification importante pour moi.
    Pour ces gestes qui font la une depuis des jours je suis assez d’accord avec votre invité, mais j’ai depuis 4 jours fait une immersion ( petite), avec coupures, dans le monde du comique, tant ce que j’ai entendu, lu, vu m’a profondément heurté. Je souhaite rectifier un de mes commentaire ou je disais « entre la peste et le choléra, je ne veux pas choisir » c’était une grave erreur Valls qui fait une politique qui me fait mal, car il est censé incarné les valeurs que je défends ne méritait pas mon commentaire face à cet individu et sa clique.
    Oui il faut trouver des moyens légaux pour stopper rapidement cette dangereuse dérive qui entrainent et alimente des gens faibles dans une folie « communautarisme » qui prend pour cible des français qui parce qu’il seraient juifs seraient a la fois des criminels ( finance, Israël etc etc )et donc, responsable des errances leur vie.
    Oui il y a danger et je suis très inquiète de ce que j’ai lu, vu.
    Mirabeau est un très bon avocat, je lui souhaite bonne chance avec son client qui ne lui facilite pas la tâche…

  2. commentaires
    incarner

  3. Le pire je crois c’est que la France a mis à peine deux ans pour mettre ces lois en vigueur, quand il a fallu dix années pour l’Allemagne. Paradoxal.

  4. Mon cher cyberpote Guy, cette lecture est en effet saine : elle fait vomir après ces orgies de fin d’année et fait donc réfléchir aux horreurs possibles. Un jour je te raconterai ma rencontre avec un ex-GI ayant libéré les camps, ses photos et ses lettres et une phrase « méfiez vous, tout cela n’est pas éteint ».

    les photos de débiles faisant des quenelles devant une plaque commémorant la déportation d’ENFANTS est le preuve de cette non extinction. Et ces quenellistes sont « multiphobes » : ils haïssent et rendent responsables de leur malheurs les juifs, mais aussi les gays, lesbiennes et les autres : Bientôt le mot « métèque » reviendra dans le langage courant, sans doute prononcé par un négro-nazi caricature pénible d’un goebels 2.0

  5. Dalloz collabo ? !

    Les pitreries d’une rédactrice de mode singée en black face sont-elles passées de mode ? Pourtant nous étions en 2013, une rédactrice de mode s’est déguisée en noire, puis elle a tweeté son selfie toute fière d’Elle.

    Je préfère un raciste affirmé qui exprime sa haine des autres plutôt que la bienveillance sournoise et déguisée.

    J’ai gardé mon code civil avant la loi du mariage pour tous pour comparer avec le nouveau, les aberrations stylistiques pour intégrer l’impossible laissent pantois.

  6. Faut pas déconner non plus, j’ai rencontré des français biens. Et puis 70 ans plus tard. Euh 70 an peut-être pas la dernière ‘de la nationalité’ Eric Besson socialo-sarkozyste 2009-2010. soit moins de quelques semaines. Bon au taff je me disais bien que Carla Brunie était une victime collatérale.

  7. La même sensation qu’en lisant Jankelevitch, sa correspondance! le reste n’est pas de mon niveau 🙂 , qui raconte que cesse soudain son métier d’enseignant et qu’il s’en va corriger des copies de philo clandestinement dans le sud..
    Je ne pense pas que ces lois aient été utilisées par des avocats, pour défendre des gens, mais qu’elles servaient à des administratifs, chambres de commerce et hauts fonctionnaires, recteurs.. pour appuyer une volonté de rejet que rien d’autre n’aurait pu justifier. D’ailleurs rien ne peut justifier ces lois, ce qui n’est pas courant.

  8. Le regretté Maurice Duverger avait ferraillé contre « le canard enchaîné », qui avait rappelé il y a une trentaine d’années ses travaux universitaire sur le juif de la loi du 2 juin 1941.
    Encore aujourd’hui, au Palais de Justice de Paris, il y a un médaillon représentant le Bâtonnier de Vichier, Jacques Charpentier, et une salle portant son nom. En 1946 celui-ci avait fait paraitre un ouvrage contenant des passages antisémites. C’est aussi lui qui eut la jouissance d’aller signifier leur radiation aux avocats juifs de passage à Drancy avant leur déportation à Auschwitz.
    Xavier Vallat, le premier commissaire général aux questions juives du régime de Vichy (viré pour cause de mollesse), fut le mieux élu aux élections du conseil de l’Ordre de 1936.
    On pourrait continuer sur le Barreau de Paris, l’antisémitisme dans les professions libérales, et naturellement les professions judiciaires en province.
    Je suppose qu’on doit pouvoir trouver le même type de littérature sur les noirs, voire sur les étrangers.

  9. Vichy, pas Vychier…

  10. Par ailleurs Maurice Duverger n’est pas mort et n’est donc pas « regretté ». C’est peut-être Thomas Fabre ?

  11. « Le même type de littérature », de littérature, le Dalloz? 🙂

  12. Bonjour,

    Merci à tous pour vos messages.

    @poisson : je suis tout à fait d’accord avec vous. Je pense que les magistrats et les avocats n’ont sans doute pas eu à s’interroger sur l’application de ces textes. Tout devait être expédié par des fonctionnaires sans mettre en place de procès équitable.

    @Armand : Je ne connaissais pas ce Maurice Duverger avant que vous ne m’en parliez. Vous avez visiblement une culture en la matière beaucoup plus large que la mienne. Je vous remercie d’en avoir fait profiter les lecteurs.

  13. @poisson Sur les noirs je ne sais pas trop, mais effectivement sur les juifs la collection 1940-1944 du Dalloz est intéressante à consulter (j’avais vu ça à la bibliothèque Cujas à Paris). La doctrine était en ébullition (avec des articles genre « les juifs et les meubles »…).

    Au risque d’être partiellement hors sujet, comme manifestement il y a des jeunes parmi nous il faut rappeler que la France est un des pays sous occupation qui a livré le moins de juifs aux Nazis, même si la manière dont les victimes préférentielles ont été sélectionnées (juifs étrangers ou dénaturalisés) permet une présentation toujours spectaculaire de la chose.L’ouvrage de référence sur le sujet est « Vichy-Auschwitz » de Serge Klarsfeld (2 volumes).
    Sur l’antisémitisme dans le monde judiciaire et en particulier à Paris et ses manifestations pendant la deuxième guerre mondiale, « un antisémitisme ordinaire » de Robert Badinter et « Robes noires, années sombres » de Liora Israël. Je recommande aussi la lecture du « procès de Xavier Vallat, présenté par ses amis » et de « Malaise au Palais » de Félix Colmet Daage (un avocat de personnes « épurées »).

  14. Je précise que je parle de la revue « Dalloz », dont la collection est consultable à Cujas. J’avais oublié qu’on appelle les codes Dalloz des « Dalloz »…

  15. Ben si les codes sont désignés par leur nom: le Litec, le Dalloz, le méga Dalloz, … surtout à Cujas.

  16. Merci encore à vous tous pour vos messages et merci à Guy pour m’avoir accueilli sur son blog. Je lui en suis très reconnaissant. Dimanche après-midi, quand je lui ai envoyé ma prose, j’avais de nombreux doutes sur l’intérêt de publier ce papier. Guy m’a dit « oui » tout de suite pour la publication et, visiblement, il a eu raison.

    Pour revenir au fond du sujet, et pour répéter ce que j’ai écrit en conclusion, je persiste à penser que la bonne solution ne peut résider dans l’interdiction des spectacles d’un humoriste. Si les autorités publiques doivent se fonder sur la dignité humaine en faisant un parallèle avec les spectacles de lancer de nains (je signale qu’il y avait à ce sujet un reportage très intéressant dans l’Equipe Mag ce week-end ; eh oui, comme quoi…), je pense que la cible risque de ne pas être atteinte et que, de surcroît, on risque de créer une jurisprudence qui pourrait être utilisée ensuite par d’autres groupuscules pour interdire les « réunions » de leurs opposants sous prétexte de trouble à l’ordre public ou d’atteinte à la dignité humaine (notion large et subjective par essence).

    Par conséquent, et pour reprendre une expression entendue ce matin sur France Culture, « c’est comme si on voulait interdire la pluie pour empêcher les inondations ».

    Si une sanction doit être prononcée, ce n’est qu’après la commission de l’infraction, et non a priori. Pour sanctionner, il faut que soit constaté un vrai trouble à l’ordre public. Cela va certainement à l’encontre du principe de précaution, mais nos libertés publiques en dépendent.

    Ne jouons pas avec cela. On risquerait de créer une « créature » jurisprudentielle qui pourrait nous échapper.

  17. Thomas Fabre, tu es avocat, tu as donc vraisemblablement fait du droit et tu ne connais pas Maurice Duverger?
    De deux choses l’une, ou tu as été le plus pitoyable étudiant en droit que le terre ait jamais porté, ou, tu n’es pas avocat.

    Mais alors, je m’interroge:
    Qui a écrit ce texte et dans quel but?

  18. Je pense que Thomas Fabre est jeune et que la plupart des jeunes ne connaissent pas Duverger. Je ne savais moi-même pas qu’il était encore en vie.
    C’est normal pour les jeunes de découvrir des choses la bouche ouverte, même si ce sont les mêmes choses que nous avions découvertes à leur âge.
    A propos de Duverger je note que dans l’excellent lien de Romain Berrendonner vers un article de la professeure Lochack celle-ci ne mentionne pas la reprise de la polémique sur Duverger par « le canard » au début des années 80…je ne l’avais quand même pas rêvée (!?).

  19. Nous sommes entré dans une ère du « Buzz » et dans l’endoctrinement de nos yeux au tout numérique qui en fait est au tout pixel. Alors, pourquoi pas se contraindre à un peu moins de facilité dans notre liberté d’expression. Ce moins de facilité pouvant simplement se traduire par la condamnation du recel par la diffusion sur internet.
    Dans le cas présent, l’individu incriminé est par exemple insolvable face à ses responsabilité pécuniaires issues de ses condamnations car la justice émets sûrement de mauvais patronymes pour les responsables moraux.
    Il faut que le discours soit clair pour ne pas dégénérer en des atouts idéologiques offerts aux futurs prétendants des urnes.

  20. @D2R2: votre message me fait bien sourire et c’est déjà ça ! Dans la mesure où je suis bien avocat, je ne peux alors que m’octroyer le prix du plus pitoyable étudiant en droit si cela peut vous faire plaisir. Puisque vous m’avez l’air bien savant, je ne vais pas vous apprendre que le droit est quelque chose de large. Son immensité me dépasse même un peu plus à chaque jour que je le pratique. Or, je pense connaître dans ma spécialité suffisamment de choses qui me nourrissent au quotidien. Eh oui, j’avoue (sans honte) que je ne connaissais pas ce Monsieur Duverger. Et même, au risque certainement de vous décevoir, je vais continuer à vivre sans me préoccuper de son existence et de son histoire. Cela ne gênera en rien ma pratique du droit dans mon exercice quotidien. Croyez-moi !

    Dois-je conclure par : « Votre Bien Dévoué Confrère » ou par « Bien à vous » ? A vous de me le dire…

  21. @Thomas Fabre : je suis d’accord avec vous en ce qui concerne Dieudonné. J’ajoute avoir souri en lisant un propos prêté à Pierre Joxe interrogé sur le projet d’interdiction de Dieudonné, qui aurait indiqué qu’il semblait avoir eu de meilleurs conseillers juridiques que son successeur Manuel Valls.

    Je viens de visionner (comme près de 3 millions d’autres personnes) la dernière vidéo de Dieudonné, j’avoue que je le trouve très fort. Arno Klarsfeld avait naguère anticipé le problème de la liberté d’expression limitée quand il s’agit des juifs, dans une émission sur LCI : il disait être d’accord pour ne plus qu’il y ait cette limitation quand il n’y aura plus de rescapés de la shoah encore en vie.
    Quoiqu’il en soit pour moi c’est Houellebecq qui a ouvert la brèche, en faisant reconnaitre par les tribunaux qu’on peut critiquer la religion musulmane sans être qualifié de raciste.
    Aucun des hebdos qui font leurs ventes sur des couvertures islamophobes n’a été interdit, voire simplement menacée d’interdiction. La chasse à l’arabe et au noir non ministre est ouverte en France.
    Dans ces conditions il me semble qu’il y a d’autres priorités que d’encourager les Klarsfeld à organiser des troubles à l’ordre public devant les spectacles de Dieudonné pour les faire interdire.
    C’est Mitterrand qui a été décoré de la plus haute distinction du régime de Vichy, pas Dieudonné.

  22. Ce n’est pas une question d’âge, si tu as fait du droit, tu as également étudié le droit constitutionnel, et là, tu peux pas louper Duverger, point barre, il est trop présent.
    Alors ignorer jusqu’à son nom…

  23. @Armand : Je n’ai même pas l’excuse de la jeunesse. Dois-je en faire une cirsconstance aggravante ? 😉

  24. @ Armand, beau souvenir Maurice Duverger. Je suis effarée de la chasse au comique Dieudonné. Désormais nous aurons nos amuseurs institutionnalisés, le racisme suintant d’un Laurent Gerra, le machisme écoeurant d’un Jean-Marie Bigard, les clichés répétés comme des vérités sur les gens des cités par un Debbouzze enrichi sur les préjugés. Petite je me souviens des blagues de Michel Leeb assénées dans les cours de récré pour se moquer des visages basanés. Et puis c’est rassurant d’imaginer le public de Dieudonné majoritairement basané, et voilé, alors qu’en réalité son public est bigarré, jeune, blanc, classe moyenne. Son humour n’est pas à la portée du premier idiot venu. Une approche sérieuse du personnage avec ses dérapages aurait permis une analyse fine de la société pour réfléchir sérieusement. Récemment, une association de victimes s’est émue des sketches des acteurs branchouilles comme Gilles Lelouche pour animer les soirées de réveillon, il se moquait du drame tutsi / hutu. Pas un intello ne s’était ému de ces blagues de mauvais goût, c’était diffusé sur Canal +, donc labellisé drôle. Une sélection des blagues et des comiques par le microcosme parisien. C’est malsain et dangereux.

  25. Ouaih ça craint pour Maurice Duverger. C’est comme Louboutin pour les modeuses, un classique.

  26. @Guy : à ce propos, quand un commentaire sous un de vos posts sur le Huffington Post est censuré, le voyez-vous ou est-il invisible pour vous aussi ? Sur « Mediapart » par exemple les employés voient les posts et commentaires censurés, qui s’affichent sur leurs écrans sous une couleur différente.

  27. Après lecture du post de Guy sur le « Huffington post » et des premiers commentaires publiés, je voudrais dire que je pense probable l’antisémitisme au moins de circonstance de Dieudonné (plus pratique pour lui), mais que faire des blagues sur les juifs, les déportés, les chambres à gaz, ce n’est pas en soi antisémite : Dieudonné en a faite sur les chambres à gaz lorsqu’il faisait équipe avec Gad Elmaleh et personne ne s’en formalisait. « Charlie hebdo » faisait des couvertures se moquant régulièrement des rescapés des camps dans les années 70, Coluche pouvait dire que les juifs sont « riches en tout », sans que ça dérange qui que ce soit.

    Il y a 20-30 ans faire une blague transgressive sur les juifs était bien vu, en particulier quand on savait que l’auteur ne pouvait pas être antisémite. Il y a eu aussi des vannes plus anciennes sur les dirigeants de l’ex-LCR, souvent venant d’eux-mêmes, sur par exemple l’apparition à la direction d’un sépharade au milieu des askhénazes.

    Bernard-Henri Lévy s’est félicité que depuis la liberté d’expression se soit réduite.

    Pour aller plus loin, on pourrait imaginer d’interdire en France tous les sites publiant des propos de Dieudonné (la Thaïlande censure bien plus de 100000 sites, et en plus la prostitution y est interdite, ce qui devrait mener à l’orgasme Nadjat Vallaud-Belkacem et Frédéric Mitterrand). Ca pallierait à l’absence de moyens juridiques de lutter contre le rire politiquement incorrect, souligé par Guy dans son post sur le « Huffington Post ».

  28. Censure chez Guy. Attention les posteurs n’aiment pas ça.

  29. Moi je ne laisse plus de commentaires sur le « Huffington post », je laisse Anne Sinclair faire joujou sans moi. Ca ne m’empêche par ailleurs pas d’y lire parfois des textes intéressants.

  30. Je ne vois pas les commentaires qui ne sont pas publiés. Sincèrement vu le niveau de certains, je m’en passe aisément…

  31. DSK est tombé par l’excès de censures qui l’entourait depuis 30 ans, s’il avait été naturel sans communicants pour cacher ses turpitudes sexuelles il serait peut être président, ses « amis » l’ont très mal défendus, sa femme n’en parlons pas. Tous ces gens doivent être bien seuls le soir chez eux. Cette teinture noir corbeau que s’impose la Sinclair tel un dirigeant de la Chine soviétique exprime son déni de la réalité et des reflets colorés de la vie. Je ne lis pas le Huff, trop moralisateur et propagandiste.

  32. On s’en fout des cheveux des gens, lovely…

  33. Ah le déni, c’est comme les photos des spectateurs et spectatrices de Dieudonné, ils sont floutés pour masquer la réalité: des blancs de la classe moyenne exécutant une quenelle. Les journalistes ont perdu pied avec la réalité. Le bouffon Dieudonné n’est qu’un représentant d’une réalité française, elle est occultée dramatiquement. La teinture noir corbeau masque les cheveux blancs, pas la racine du problème endémique chez une femme.

  34. La censure tient Guy. Salut.

  35. ???

  36. Toute cette histoire est difficile, pour ne pas utiliser un terme trop émotionnel, toutes les hystéries, qui tournent autour des identités sont dures, mais elles nous obligent à réfléchir collectivement, sur ce qui nous préoccupent ou nous interpellent parfois intimement.
    Alors c’est qu’il est grand temps, urgent, de poser sur la place publique toutes ces rancœurs, rumeurs sales histoires de France, qui concernent les juifs, les arabes, les homos, les roms etc, toutes ces rumeurs, qui acidifient les relations et fortifient les communautarismes ( que le débat sur l’identité a bien nourrit).
    Cette énième histoire qui blessent forcément, devra, m^me dans la douleur, éclairer et faire avancer, certes, avec des contradictions, le débat et je l’espère, vers plus de compréhension, de tolérance, des uns envers les autres. ( c’est pas gagné et il faudra sur l’ouvrage revenir).
    Il n’y a aucun angélisme dans mon propos, la route est longue, mais c’est celle, la m^me qui a débuté avec l’Humanité.

  37. Comme des millions j’ai fait une dépression après la diffusion de « Holocauste » en même temps (rien à voir) je lisais « Les Chênes verts » de Sylvie Caster. Double peine. Je sais que ça ne s’arrêtera jamais. En plus je suis obligée de trouver Alain Juppé sympathique. Triple peine.

  38. Il ne faut pas appeler le Code civil un livre. Il faudrait dire « il faut garder les codes ». C’est un témoin de la réalité juridique et politique irréfutable. Et je suis d’accord avec vous pour opposer à M. Dieudonné des arguments juridiques.
    On pourrait d’ailleurs continuer l’exercice sur le droit des femmes avec le code civil de 1804, de 1938, de 1979…:
    1804 : Le code civil prévoit que : « le mari doit protection à la femme, la femme doit obéissance à son mari »
    1920 : La loi assimile la contraception à l’avortement qui est considéré comme un crime

    1938 : Suppressions de l’incapacité juridique de la femme mariée

    et aussi avec les droits de l’enfant, les droits des homosexuels….

  39. Caramba. C’est bien plaisant sauf la fin. Euuh keske le Dieudonné vient faire lá dedans?
    Au dernières nouvelles et selon les médias respectables, Dieudonné serait accusé de lancer des nains pendant ses spectacles et d’être antisémite.
    Etonnant non?

  40. @pipard-thavez : Vous me faîtes un faux procès :-)

    J’ai envie de vous donner raison sur le point de ne pas considérer un Code civil comme un livre.

    Néanmoins, je m’interroge : à partir de quel moment devient-on un « livre » ? Avec quels attributs accède-t-on au statut de « livre » ? (questions quasi-sartriennes)

    De plus, si on veut ergoter, la loi de 1941 n’a pas été codifiée en tant que telle dans le Code civil : elle est juste mentionnée à titre informatif à la suite de l’article 21 du Code civil de cette édition de 1944 (je laisse à Armand et à R2D2 le soin de me reprendre vu qu’ils ont dû être des élèves beaucoup plus assidus que moi à la fac lors des cours qui traitaient de ces questions…). Donc, allons plus loin, cette loi fait-elle partie intégrante du Code Civil ? Je ne le pense pas. Le titre « Il faut garder les Codes », comme vous me le suggérez, convient-il dans ce cas ? Je ne le crois pas.

    Je vais même vous faire une confidence (et quitte à être en contradiction avec moi-même) : autant je n’ai eu jusqu’à ce jour aucun scrupule à jeter des quantités de codes ou des manuels de droit démodés (si « le bon artisan est celui qui a de bons outils », le bon juriste doit être celui qui a des codes ou des manuels à jour), autant j’ai toujours eu un problème à jeter des livres (romans, essais, BD…). Dois-je en parler à mon psy ?

    Dans l’histoire que j’ai raconté ici, c’est parce qu’il m’avait été demandé par ma mère de vérifier un carton de livres que je suis tombé par hasard sur ce vieux code. C’est pourquoi j’avais choisi ce titre « Pourquoi il ne faut jamais jeter les livres » qui est en totale cohérence avec ma philosophie.

    Par ailleurs, je n’ai aucune prétention à faire de l’histoire du droit et, au risque de me répéter, je tenais juste à vous faire partager ces pages, retrouvées par le plus grand des hasards, parce qu’elles m’avaient émues (et visiblement je ne suis pas le seul).

    Je ne compte pas me lancer dans un travail d’analyse comparée entre des lois qui viseraient tel groupe plutôt qu’un autre. Cela ne m’intéresse pas. Je vous laisse libre de mettre en route ce chantier.

    @Armand, R2D2, Lovely : J’ai fait un petit sondage autour de moi parmi mes amis confrères et juristes (je dois avoir consulté pour le moment une quinzaine de personnes environ). Je suis au regret de vous apprendre qu’aucun n’avait connaissance de ce M. Duverger ! Je ne vois que deux explications possibles à cela : soit je n’ai que des amis qui sont aussi nuls que moi (théorie la plus probable, j’en conviens), soit on avait autre chose à étudier à 20 ans que le statut des juifs durant la seconde guerre mondiale.

    Dans les deux cas, nous sommes inexcusables. Mais, une fois encore, je vous remercie d’avoir permis de rattraper cette lacune.

  41. Pas lu tous les commentaires.
    Pas fait d’études de Droits.
    Quand je lis certains dirent ; interdire la pluie n’empêche pas les inondations, je suis d’accord.
    Quand j’entends le Maire de Tours dire sur France Culture qu’ils ont besoin d’interdire, car il faut donner l’exemple et montrer qu’on n’a pas le droit de tenir des propos racistes/antisémites/homophobe… je suis également d’accord avec lui.

    Les enfants, qui seront de futurs adultes, doivent savoir que c’est interdit de se donner en spectacles avec de telles déclarations. Il faut qu’il connaissent les limites. Les mômes sont des éponges, ils font ce que nous faisons, leur dire de ne pas faire ne suffit pas, seul ce que nous faisons sera vu, entendu et interprété (ça fonctionne aussi pour le reste, rouler bourré, téléphoner au volant…).

    Et quand je vois l’homophobie, le racisme envahirent les cours de récré, ce n’est pas normal. Il faut faire quelque chose. Même si le but de la circulaire de Valls (et pourtant je ne l’apprécie pas vraiment le garçon, je préfère de très loin Joxe) est de lui plomber son économie en faisant en sorte que les salles se ferment à son spectacle, et bien utilisons ce moyen là. Même si il devient « martyr », sa promo à DIeudonné, elle est faîte, d’autres prennent et prendront conscience de l’ignominie de ses dires.

    La majorité silencieuse, on ne l’entend pas, comme tout ceux qui sont contre l’homophobie, ils sont là, mais ne manifestent pas… et je suis sure qu’ils apprécient qu’on puisse interdire une telle haine à se mettre en spectacle.

    Je ne suis spécialiste en rien. Je n’ai pas de réponse,

    je suis pour la Liberté d’expression et, n’étant pas à une contradiction près, je suis contente que les maires aient enfin un outil pour interdire ce genre de propos incendiaires et totalement odieux.

    Je vais prendre le temps de tout lire, Dalloz que j’ai survolé, et les commentaires…

    Bonne suite dans les idées

    PS : j’aime bien cette épicerie où tout le monde discute, enfin on monologue quand même pas mal aussi….

  42. Faut surtout pas interdire pcq quand il y aura un gouvernement FN ou bigot ils interdiront ce qu’ils veulent á tour de bras pcq c’est comme ça qu’on fait en France depuis Valls contre la haine diront-ils.
    Et vous pourrez rien opposer car ce sont vos arguments á vous les vallsistes censeurs.
    C’est pourtant pas compliqué á capter.

  43. à Gru
    sincèrement un gouv FN ou bigot ils interdiront tout ce qui ne va pas dans le sens de leurs « valeurs » enfin, fonds de commerce plutôt, à savoir le
    racisme et l’homophobie
    avec ou sans Dalloz

  44. Eh bien oui ségo c’est bien pour ça que Valls a méga tort.

  45. Il est difficile, en effet de devoir interdire mais, le monde du spectacle et dans un tout autre domaine, le jeu vidéo, ont cette trop grande puissance d’exprimer un droit d’expression et un droit de commerce.
    Plus humainement, c’est à dire, au niveau de la cité, un conseil municipal et son maire, pourtant élu, choisi pour leur conception de vie en commun, n’ont plus leur « liberté d’expression et d’action » face aux entités se targuant de droits universels mais donc le caractère immédiat est vénal.

  46. Duverger pour un juriste c’est comme Louboutin pour une modeuse. Bref.

  47. @Lovely: Vous vous répétez, ma bonne Dame. Est-ce l’âge ?

  48. Le Conseil d’Etat a rendu sa décision : il va donc falloir désormais vivre avec une drôle de « créature » jurisprudentielle dont, malheureusement, on ne maîtrise pas toutes les conséquences…

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6 Jan, 2014

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