[youtube]http://www.youtube.com/watch?v=yGKPHFrHVVY[/youtube]
Il est midi. Il est allongé de tout son long. Conscient. Mais incapable de se relever. La quarantaine. Nous sommes dans l’un des quartiers les plus huppés de la capitale ; devant la Banque de France au coin de la rue de Sèvres et du Boulevard Raspail. Je me suis accroupi, l’ai aidé à s’asseoir avec une jeune femme qui est rapidement repartie et on a commencé à discuter, tous les deux.
Il est midi. Il est allongé de tout son long. Conscient. Mais incapable de se relever. La quarantaine. Nous sommes dans l’un des quartiers les plus huppés de la capitale ; devant la Banque de France au coin de la rue de Sèvres et du Boulevard Raspail. Je me suis accroupi, l’ai aidé à s’asseoir avec une jeune femme qui est rapidement repartie et on a commencé à discuter, tous les deux.
(…)
Je n’ai pas pu faire autrement que de l’engueuler d’abord parce qu’il refusait que j’appelle la police pour l’aider. Il m’explique qu’il ne veut pas. « Je ne veux pas me retrouver à Nanterre ». Je tente de le convaincre. Rien à faire. Il fait froid. Je lui propose de traverser au soleil. Un truc bien débile pour parler quoi. Comme s’il faisait moins froid sur le trottoir d’en face ! Il me regarde dans les yeux. Ça fait deux mois qu’il est dehors. Il n’a pas mangé depuis deux jours. Il a la tête qui tourne.
J’essaye de nouveau de le convaincre de me laisser appeler pour qu’il aille se requinquer au chaud. Il me supplie de ne pas le faire. Il me supplie vraiment. On vous a déjà supplié vous ? J’ai le téléphone à la main. J’essaie encore. Et puis je laisse tomber. On parle. Je suis accroupi. Il est adossé au mur. Les gens nous regardent comme deux martiens. Il me remercie juste de m’être arrêté et de lui parler. Je finis par lui proposer de nouveau de traverser au soleil. Il accepte et s’accroche à mon bras.
On parle en traversant la rue, bras dessus bras dessous. Il vacille un peu. Il a eu froid tout l’hiver : « la météo ne nous aide pas » dit-il. « j’ai eu de la neige sur mon duvet ». J’ai l’air d’un con. Il veut de l’argent ou des tickets restau. Je ne vais rien lui donner. Mais il me remercie encore et m’interroge sur mon métier. «Je suis éditeur ». « Un nouveau Gallimard » lâche-t-il dans un sourire. Je le laisse au métro. « Ça va aller » me dit-il. « Merci de m’avoir parlé » finit-il en me serrant la main et en me regardant droit dans les yeux.
Après ce regard, le CPE, Montebourg, Villepin, Sarko, ce blog ça n’a plus aucune importance.
0 commentaires
Trackbacks/Pingbacks