Qui la remplira ?
« Y’en a un peu plus, je vous l’mets quand même ? »
Miller, les juifs, la France, la morale, le fond et la forme
Tout a commencé avec une tribune de Gérard Miller publiée dans Le monde, titrée "Jamais autant de juifs français n'ont perdu à ce point leur boussole morale". Pour moi, rien n'allait dans cette expression "juifs français". Reprenant l'écrit fulgurant de mon regretté...
18 juin 2023
Gloire aux FTP-MOI !
.
PROUT
« … »
et les pages noires ? Raciste…
Presse Française qui fout les boules
La une de Paris Match, une tepu. C’est du lourd quand même. Les infos ? La nouvelle star ; les exclus ? Carla bruni – Sarkozy ou Zemmour ou BHL…
C’est ça l’info d’aujourd’hui.
Ou alors ils tapent fort, oops ! Directement ils te balancent de l’Haïti avec des images terribles d’enfants morts, de femmes brûlées et de père de famille décapités. C’est la nouvelle presse de notre pays. C’est la crise, elle nage, se noie, remonte, rêve que tout va bien ; tente, fait des expériences, se lamente, cherche le gain et non plus le partage ou le risque.
Non ; le risque, ça, la presse Française elle n’aime pas ; c’est dangereux ou alors il faut vraiment faire des trucs très très dangereux (comme infiltrer un gang de de dealers tueurs place Clichy) il faut que tout soit propre, bien clair et bien précis ; afin que nous puissions tous bien comprendre.
Ils insistent avec courtoisie ; créer des fans pages à leur effigie, discutent, twit ; ça ils adorent ! Ils twit tous hi hi hi.
Ils sont entre eux, ils se balancent tout pleins de chouettes infos, ils se comprennent d’une émoticône, d’un mouvement @ ; c’est des forts quand même!
– Ouais, ne faut pas tous les mettre dans le même sac ! Y’en a des très bien !
Okay ! Des noms.
J’attends.
Je ne vois pas, ou peu, le journal Monde qui semble éventuellement resté stable, Libération version papier ça va ; Libé version numérique qui tente de se trouver une identité ; mais finalement, ils se ressemblent tous.
L’Express, Le point, Le Figaro et autres. Un cercle clos, presque vide, désolant ; et surtout ce côté « en boucle », c’est vraiment terrible ; c’est comme écouter la radio, certaines diffusent toutes les heures les mêmes rengaines commerciales, les mêmes pubs insupportables ; bref STOP!
Libérez-vous, c’est dur, c’est la fin de quelque chose possible ; oui, je ne vis pas de la presse ; alors j’ai un œil avertit, sans contrainte, libre.
C’est pas gentil ? Bah non…mais la presse l’est-elle avec nous ? En nous traitant comme des pigeons ?
Je veux de l’info, de la vraie, pas du Zoubida qui fait sa catin ou de la nouvelle star (même si Manoukian est top et Lio est drôle) à toutes les sauces ; je suis sûre que la presse Française est bourrée de talent (je rentre dans la partie positive là) et qu’elle a peur de l’exploiter (oui ; je vais loin)
Voilà, restez-avec nous, ne sous-estimez pas les lecteurs ; les gens ; les acheteurs et vos abonnés…
Vous risqueriez à court terme de le regretter.
Donc j’exige :
De l’info internationale, mais pas larmoyante
Du sexe aussi, mais pas sale (oui, mais ça existe) ^^
Des sujets de société traités à l’ancienne ; avec rigidité, bonté et parfum de vanille (ça ne veut rien dire et alors ?)
Pas du Sarkozy tout le temps, on sait, c’est le Président, il insulte les gens etc. Mais ‘est pas une raison pour le mettre en une tous les chaque matins
De l’info régionale, limite un peu faits divers, en plus, le Français excelle dans ce domaine. Il y’ait un côté ragot made in bled qui persiste chez le Français, moi j’aime bien.
Et puis du bon, du lourd, du journalisme à papa, du Léon Zitrône mood Beigbeder ! Du bien quoi !
Voilà, cet article est terminé, j’avoue, je me suis pas foulée ; j’ai imité la presse…
Facebook AV- 29 -2010
MarianeB.
c’est un petit article, écrit ily a quelques jours; de moi bien sûr…
j’en profite pour indiquer que ma première nouvelle est disponible sur le site the book edition point com ; elles’appelle : obsessed
vbonne journée
Mariane B.
azerty
c’est une des meilleures argumentations sur le sujet ! Bien qu’il me semble vous avoir lu plus modéré….
Ce qui est sûr c’est que c’est pour des billets comme celui-ci que je vous lis quotidiennement.
Merci Guy !!!
Je n’ai pas de jus de citron sous la main.
Excellent billet
Yep, pas mieux !
RIEN.
Cela me fait penser avec horreur à toutes ces tablettes informatiques, sans batterie, sans argent pour des abonnements à des sites accaparant la littérature pour ensuite distiller une bonne pensée. Et plus un livre papier sous le pied de ma table. Un fahrenheit 451.
C’est la page la mieux écrite de l’épicerie !
c’est nul on ne peut même pas mettre un truc dessus à la bombe.
C’est un peu du réchauffé quand même, vu le nombre de blog aussi vide que ca sur le net ;p
Aprés ce copiecolle, je caracole à mes occupations.
Le crowdsourcing est un néologisme conçu en 2006 par Jeff Howe et Mark Robinson, rédacteurs à Wired magazine. Calqué sur l’outsourcing (externalisation), qui consiste à faire réaliser en sous-traitance, donc externaliser des tâches qui ne sont pas du métier fondamental de l’entreprise, le crowdsourcing consiste à utiliser la créativité, l’intelligence et le savoir-faire d’un grand nombre d’internautes, et ce, au moindre coût. La traduction littérale de crowdsourcing est « approvisionnement par la foule », mais ne reflète pas le véritable contenu du vocable. Une autre proposition de traduction pourrait être : « impartition à grande échelle » ou encore « externalisation à grande échelle ».
Micropaiement
L’exemple représentatif cité par Jeff Howe1 est celui de Claudia Menashe recherchant quelques photos pour illustrer la grippe aviaire sur un stand lors d’une exposition du National Health Museum (Musée national de la santé) de Washington. Elle entre en négociation, sachant son faible budget, avec un photographe professionnel, Mark Harmel, qui est prêt à lui concéder à un prix qu’il considère comme deux fois plus faible que ses tarifs habituels, 4 photos pour 600 $.
C’est alors que Claudia Menashe découvre sur iStockphoto des documents ayant les caractéristiques qu’elle recherche. Elle annonce à Mark Harmel qu’elle a trouvé son bonheur, s’étant procurée via iStockphoto, 56 images à environ 1 $ pièce. L’histoire se termine de la façon suivante : le photographe professionnel Mark Harmel a compris qu’il ne pouvait pas lutter contre une foule d’amateurs de mieux en mieux équipés (appareil photo à moins de 1000 $, logiciel de traitement d’image, ordinateur personnel et internet) consentant à être rétribués de 1 $ à 5 $ par photo. Il concentre maintenant son activité sur le travail à la commande.
Ce principe du micropaiement permet aux sites Web de se rémunérer et à de nombreux contributeurs de se faire de l’argent de poche, ou un complément de revenus, ce commerce échappant pour le moment aux agents de fisc.
Bénévolat et crowdsourcing
On peut rapprocher le crowdsourcing du concept de pronétariat, autre néologisme du même domaine, proposé par Joël de Rosnay en 2005. Le crowdsourcing peut constituer une des activités lucratives, même si elle est marginale, du « pronétaire ». Si le bénévolat peut se résumer à l’engagement volontaire à un organisme à but non lucratif, œuvre sociale ou caritative, on ne peut pas le considérer comme synonyme de crowdsourcing, dans la mesure où des sociétés commerciales sont à l’origine de la création du concept.
Néologisme équivalent
Blogsourcing, qui précise que la création de contenus, de projets ou le développement d’idées se font par l’utilisation d’un blog comme plateforme de création collaborative.
Crowdfunding, qui consiste à faire financer des projets en faisant collaborer les internautes. Ce mode de financement alternatif permet d’obtenir des évaluations et des analyses émanant des participants qui souhaitent financer à une levée de fonds.
C’est toujours comme-ça lorsque le 1 tombe un ça me dit. Mais pas trop. Nous sommes toujours en avril.
Le Monde annonce sur son site web que le gouvernement veut la retraite a 63 ans en 2030
http://bit.ly/aNvAGb
Commme aujourd’hui c’est la Journée mondiale de la liberté de la presse, Guy nous donne carte blanche !
.
un soutien aux sans papiers ?
à la presse traditionnelle ?
une illustration de la dette ?
un écran de fumée! le volcan qui refume ?
les nouvelles stats du gouvernement sur l’embauche?
Un détail, un agrandissement, de la couche de maquillage de Carla ?
…
Au nom du respect de la diversité, j’exige immédiatement la publication d’une page noire, jaune, rose et taupe prunée.
bon, j’y vais mais j’ai peur…
« Par les soirs bleus d’été, j’irai dans les sentiers,
Picoté par les blés, fouler l’herbe menue :
Rêveur, j’en sentirai la fraîcheur à mes pieds.
Je laisserai le vent baigner ma tête nue.
Je ne parlerai pas, je ne penserai rien :
Mais l’amour infini me montera dans l’âme,
Et j’irai loin, bien loin, comme un bohémien,
Par la Nature, heureux comme avec une femme. »
A. Rimbaud (Sensation)
« Ah ! grâce aux passions que mon coeur se retranche, Puisse toute ma vie être une page blanche ! » – Lamartine –
Un sujet qui mériterait chronique?
Jess de « la minute blonde » sur Le Post virée car balancée à son employeur par un lecteur pas content…
http://www.bit.ly/JessduPost
comment jongler avec son agenda et donner l’impression que l’on s’efface pour vous faire de la place
pomme Q
gonflé
quand on s’était dit que cette journée était mal barrée
la preuve, on la tient et ce n’est pas la première ce matin
par-dessus le marché
allez, on reprend le fil de son occupation
à son compteur, ça grimpe comme tous les matins
ni plus, ni moins de commentaires
derrière, ça devait rigoler
si seulement on avait pu y être, ce que l’agenda ne permettait précisément pas
pomme Q
son occupation, le retour
ses oignons
oui, mais
voilà qu’ils n’aimantent plus l’attention
inhabituel
tiens, tiens
mais la journée avait mal commencé
(répétition)
au lieu du sempiternel « commentaire »
à la place d’un avis (que l’on a toujours)
on fait ce que l’on veut
dommage qu’il n’ait pas été prévu que son invention remplisse l’espace réservé à la page blanche
on y aurait davantage cru
ça doit être bien de relever le compteur de ses lecteurs
on écrit aussi pour ça
être lu, c’est déjà s’imaginer que l’on est lumineux
un plaisir auquel, même entêté, on peu se faire prendre
en pensant à sa pomme, son petit plaisir
car, sur l’ensemble des clics, d’aucuns durent
en ôtant les lecteurs qui s’étaient endormis le doigt appuyé sur le mulot
il y a les curieux
même s’ils sont peu nombreux
ils liront tous les commentaires
y compris ceux qui ne valent rien
risqué
mais la journée aura eu l’air (qu’elle n’a pas) de bien s’annoncer
et jusque-là, c’était l’inverse
saisi d’effroi
tout au remords qui va suivre
il n’y a plus qu’à cliquer sur « Envoyer »
après avoir tapé sur les nerfs
des rares qui sont venus à bout de sa page blanche (même si on n’est pas dupe, on est dans l’espace commentaires)
celui qui relève le compteur fait un chouette métier
Sans commentaire.
« Fard », un Big Brother d’animation
– Court-métrage d’animation primé dans des festivals du monde entier, « Fard », réalisé par les Français Luis Briceno et David Alapont, est une plongée dans un univers dystopique oppressant, une société bureaucratique, ultra-contrôlée rappelant « 1984 », et dans laquelle un simple employé de bureau va voir sa vie basculer après la découverte d’une étrange lampe.
http://revuedeweb.blogs.nouvelobs.com/archive/2010/04/13/fard-un-big-brother-d-animation.html
Pause humour.
Le Ministre de l’intérieur, Brice Hortefeux, a affirmé, dans un entretien à France-Soir
de lundi, après les nouveaux caillassages de bus à Tremblay-en-France, que dans « un État républicain, il n’y a pas de zones de non-droit ».
Deux réflexions de mes lecteurs :
« Monsieur Sarkozy, au Ministère de l’Intérieur, devrait installer un perroquet; une mesure efficace en terme de répétitions et économique puisque cet oiseau vit une cinquantaine d’années. »
« Le seul trafic que Monsieur Hortefeux a pu arrêter c’est celui des bus à Tremblay en France. »
Bonne journée.
Ma prière du Lundi:
PATER NOSTER
Notre père qui êtes aux cieux
Restez-y
Et nous nous resterons sur le terre
Qui est quelquefois si jolie
Avec ses mystères de New-York
Et puis ses mystères de Paris
Qui valent bien celui de la Trinité
Avec son petit canal de l’Ourcq
Sa grande muraille de Chine
Sa rivière de Morlaix
Ses bêtises de Cambrai
Avec son océan Pacifique
Et ses deux bassins aux Tuilleries
Avec ses bons enfants et ses mauvais sujets
Avec toutes les merveilles du monde
Qui sont là
Simplement sur la terre
Offertes à tout le monde
Eparpillées
Emerveillées elles mêmes d’être de telles merveilles.
Et qui n’osent se l’avouer
Comme une jolie fille nue qui n’ose se montrer
Avec les épouvantables malheurs du monde
Qui sont légion
Avec leurs légionnaires
Avec leurs tortionnaires
Avec les maîtres de ce monde
Les maîtres avec leurs prêtres leurs traîtres et leurs reîtres
Avec les saisons
Avec les années
Avec les jolies filles et avec les vieux cons
Avec la paille de la misère pourrissant dans l’acier des canons.
Jacques Prévert
Amen…
Allez en paix mes frères en ce Lundi au plafond un peu gris.
« L’histoire n’est pas le lieu de la félicité. Les périodes de bonheur y sont ses pages blanches » Friedrich Hegel
Vous êtes en avance de 3 jours. La date de son élection c’est le 6 mai.
Sinon, plutôt bien vu le bilan.
Prochaines étapes le crowdcasting et le crowdfunding ?
Make your very own volcano will really erupt with bubbly, fizzy lava.
Perform an amazing eruption in front of your friends,family,colleague,country
The eruption can be performed repeatedly and the fun is unlimited.
Option :rough flight in the ash cloud
http://www.youtube.com/watch?v=FJO8kcZdfQM
http://www.epartyunlimited.com/volcanokit.html
« Vieil océan, ta forme harmonieusement sphérique, qui
réjouit la face grave de la géométrie, ne me rappelle que
trop les petits yeux de l’homme, pareils à ceux du sanglier
pour la petitesse, et à ceux des oiseaux de nuit pour la
perfection circulaire du contour. Cependant, l’homme s’est
cru beau dans tous les siècles. Moi, je suppose plutôt que
l’homme ne croit à sa beauté que par amour-propre; mais,
qu’il n’est pas beau réellement et qu’il s’en doute; car,
pourquoi regarde-t-il la figure de son semblable avec tant de
mépris? Je te salue, vieil océan!
Vieil océan, tu es le symbole de l’identité: toujours
égal à toi-même. Tu ne varies pas d’une manière essentielle,
et, si tes vagues sont quelque part en furie, plus loin, dans
quelque autre zone, elles sont dans le calme le plus complet.
Tu n’es pas comme l’homme, qui s’arrête dans la rue, pour
voir deux boule-dogues s’empoigner au cou, mais, qui ne
s’arrête pas, quand un enterrement passe; qui est ce matin
accessible et ce soir de mauvaise humeur; qui rit aujourd’hui
et pleure demain. Je te salue, vieil océan! Vieil océan, il
n’y aurait rien d’impossible à ce que tu caches dans ton sein
de futures utilités pour l’homme. Tu lui as déjà donné la
baleine. Tu ne laisses pas facilement deviner aux yeux
avides des sciences naturelles les mille secrets de ton
intime organisation : tu es modeste. L’homme se vante sans
cesse, et pour des minuties. Je te salue, vieil océan!
Vieil océan, les différentes espèces de poissons que tu
nourris n’ont pas juré fraternité entre elles. Chaque espèce
vit de son côté. Les tempéraments et les conformations qui
varient dans chacune d’elles, expliquent, d’une manière
satisfaisante, ce qui ne paraît d’abord qu’une anomalie. Il
en est ainsi de l’homme, qui n’a pas les mêmes motifs
d’excuse. Un morceau de terre est-il occupé par trente
millions d’êtres humains, ceux-ci se croient obligés de ne
pas se mêler de l’existence de leurs voisins, fixés comme des
racines sur le morceau de terre qui suit. En descendant du
grand au petit, chaque homme vit comme un sauvage dans sa
tanière, et en sort rarement pour visiter son semblable,
accroupi pareillement dans une autre tanière. La grande
famille universelle des humains est une utopie digne de la
logique la plus médiocre. En outre, du spectacle de tes
mamelles fécondes, se dégage la notion d’ingratitude; car, on
pense aussitôt à ces parents nombreux, assez ingrats envers
le Créateur, pour abandonner le fruit de leur misérable
union. Je te salue, vieil océan!
Vieil océan, ta grandeur matérielle ne peut se comparer
qu’à la mesure qu’on se fait de ce qu’il a fallu de puissance
active pour engendrer la totalité de ta masse. On ne peut pas
t’embrasser d’un coup d’oeil. Pour te contempler, il faut que
la vue tourne son télescope, par un mouvement continu, vers
les quatre points de l’horizon, de même qu’un mathématicien,
afin de résoudre une équation algébrique, est obligé
d’examiner séparément les divers cas possibles, avant de
trancher la difficulté. L’homme mange des substances
nourrissantes, et fait d’autres efforts, dignes d’un meilleur
sort, pour paraître gras. Qu’elle se gonfle tant qu’elle
voudra, cette adorable grenouille. Sois tranquille, elle ne
t’égalera pas en grosseur; je le suppose, du moins. Je te
salue, vieil océan! Vieil océan, tes eaux sont amères. C’est
exactement le même goût que le fiel que distille la critique
sur les beaux-arts, sur les sciences, sur tout. Si quelqu’un
a du génie, on le fait passer pour un idiot; si quelque autre
est beau de corps, c’est un bossu affreux. Certes, il faut
que l’homme sente avec force son imperfection, dont les trois
quarts d’ailleurs ne sont dus qu’à lui-même, pour la
critiquer ainsi! Je te salue, vieil océan!
Vieil océan, les hommes, malgré l’excellence de leurs
méthodes, ne sont pas encore parvenus, aidés par les moyens
d’investigation de la science, à mesurer la profondeur
vertigineuse de tes abîmes; tu en as que les sondes les plus
longues, les plus pesantes, ont reconnu inaccessibles. Aux
poissons… ça leur est permis: pas aux hommes. Souvent, je
me suis demandé quelle chose était le plus facile à
reconnaître : la profondeur de l’océan ou la profondeur du
coeur humain ! Souvent, la main portée au front, debout sur
les vaisseaux, tandis que la lune se balançait entre les mâts
d’une façon irrégulière, je me suis surpris, faisant
abstraction de tout ce qui n’était pas le but que je
poursuivais, m’efforçant de résoudre ce difficile problème!
Oui, quel est le plus profond, le plus impénétrable des deux
: l’océan ou le coeur humain? Si trente ans d’expérience de
la vie peuvent jusqu’à un certain point pencher la balance
vers l’une ou l’autre de ces solutions, il me sera permis de
dire que, malgré la profondeur de l’océan, il ne peut pas se
mettre en ligne, quant à la comparaison sur cette propriété,
avec la profondeur du coeur humain. J’ai été en relation avec
des hommes qui ont été vertueux. Ils mouraient à soixante
ans, et chacun ne manquait pas de s’écrier : « Ils ont fait
le bien sur cette terre, c’est-à-dire qu’ils ont pratiqué la
charité : voilà tout, ce n’est pas malin, chacun peut en
faire autant. » Qui comprendra pourquoi deux amants qui
s’idolâtraient la veille, pour un mot mal interprété,
s’écartent, l’un vers l’orient, l’autre vers l’occident, avec
les aiguillons de la haine, de la vengeance, de l’amour et du
remords, et ne se revoient plus, chacun drapé dans sa fierté
solitaire. C’est un miracle qui se renouvelle chaque jour
et qui n’en est pas moins miraculeux. Qui comprendra pourquoi
l’on savoure non seulement les disgrâces générales de ses
semblables, mais encore les particulières de ses amis les
plus chers, tandis que l’on en est affligé en même temps? Un
exemple incontestable pour clore la série : l’homme dit
hypocritement oui et pense non. C’est pour cela que les
marcassins de l’humanité ont tant de confiance les uns dans
les autres et ne sont pas égoïstes. Il reste à la psychologie
beaucoup de progrès à faire. Je te salue, vieil océan!
Vieil océan, tu es si puissant, que les hommes l’ont
appris à leurs propres dépens. Ils ont beau employer toutes
les ressources de leur génie… incapables de te dominer. Ils
ont trouvé leur maître. Je dis qu’ils ont trouvé quelque
chose de plus fort qu’eux. Ce quelque chose a un nom. Ce nom
est : l’océan! La peur que tu leur inspires est telle,
qu’ils te respectent. Malgré cela, tu fais valser leurs plus
lourdes machines avec grâce, élégance et facilité. Tu leur
fais faire des sauts gymnastiques jusqu’au ciel, et des
plongeons admirables jusqu’au fond de tes domaines : un
saltimbanque en serait jaloux. Bienheureux sont-ils, quand
tu ne les enveloppes pas définitivement dans tes plis
bouillonnants, pour aller voir, sans chemin de fer, dans tes
entrailles aquatiques, comment se portent les poissons, et
surtout comment ils se portent eux-mêmes. L’homme dit : « Je
suis plus intelligent que l’océan. » C’est possible; c’est
même assez vrai; mais l’océan lui est plus redoutable que
lui à l’océan : c’est ce qu’il n’est pas nécessaire de
prouver. Ce patriarche observateur, contemporain des
premières époques de notre globe suspendu, sourit de pitié,
quand il assiste aux combats navals des nations. Voilà une
centaine de léviathans qui sont sortis des mains de
l’humanité. Les ordres emphatiques des supérieurs, les cris
des blessés, les coups de canon, c’est du bruit fait exprès
pour anéantir quelques secondes. Il paraît que le drame est
fini, et que l’océan a tout mis dans son ventre. La gueule
est formidable. Elle doit être grande vers le bas, dans la
direction de l’inconnu! Pour couronner enfin la stupide
comédie, qui n’est pas même intéressante, on voit, au milieu
des airs, quelque cigogne, attardée par la fatigue, qui se
met à crier, sans arrêter l’envergure de son vol : « Tiens! …
je la trouve mauvaise! Il y avait en bas des points
noirs; j’ai fermé les yeux : ils ont disparu. » Je te salue,
vieil océan!
Vieil océan, ô grand célibataire, quand tu parcours
la solitude solennelle de tes royaumes flegmatiques, tu
t’enorgueillis à juste titre de ta magnificence native, et
des éloges vrais que je m’empresse de te donner. Balancé
voluptueusement par les molles effluves de ta lenteur
majestueuse, qui est le plus grandiose parmi les attributs
dont le souverain pouvoir t’a gratifié, tu déroules, au
milieu d’un sombre mystère, sur toute ta surface sublime,
tes vagues incomparables, avec le sentiment calme de ta
puissance éternelle. Elles se suivent parallèlement,
séparées par de courts intervalles. A peine l’une diminue,
qu’une autre va à sa rencontre en grandissant, accompagnées
du bruit mélancolique de l’écume qui se fond, pour nous
avertir que tout est écume. (Ainsi, les êtres humains, ces
vagues vivantes, meurent l’un après l’autre, d’une manière
monotone; mais, sans laisser de bruit écumeux). L’oiseau de
passage se repose sur elles avec confiance, et se laisse
abandonner à leurs mouvements, pleins d’une grâce fière,
jusqu’à ce que les os de ses ailes aient recouvré leur
vigueur accoutumée pour continuer le pèlerinage aérien. Je
voudrais que la majesté humaine ne fût que l’incarnation du
reflet de la tienne. Je demande beaucoup, et ce souhait
sincère est glorieux pour toi. Ta grandeur morale, image de
l’infini, est immense comme la réflexion du philosophe,
comme l’amour de la femme, comme la beauté divine de
l’oiseau, comme les méditations du poète. Tu es plus beau
que la nuit. Réponds-moi, océan, veux-tu être mon frère?
Remue-toi avec impétuosité… plus… plus encore, si tu
veux que je te compare à la vengeance de Dieu; allonge tes
griffes livides, en te frayant un chemin sur ton propre
sein… c’est bien. Déroule tes vagues épouvantables, océan
hideux, compris par moi seul, et devant lequel je tombe,
prosterné à tes genoux. La majesté de l’homme est empruntée;
il ne m’imposera point: toi, oui. Oh! quand tu t’avances, la
crête haute et terrible, entouré de tes replis tortueux
comme d’une cour, magnétiseur et farouche, roulant tes ondes
les unes sur les autres, avec la conscience de ce que tu es,
pendant que tu pousses, des profondeurs de ta poitrine,
comme accablé d’un remords intense que je ne puis pas
découvrir, ce sourd mugissement perpétuel que les hommes
redoutent tant, même quand ils te contemplent, en sûreté,
tremblants sur le rivage, alors, je vois qu’il ne
m’appartient pas, le droit insigne de me dire ton égal.
C’est pourquoi, en présence de ta supériorité, je te
donnerais tout mon amour (et nul ne sait la quantité d’amour
que contiennent mes aspirations vers le beau), si tu ne me
faisais douloureusement penser à mes semblables, qui forment
avec toi le plus ironique contraste, l’antithèse la plus
bouffonne que l’on ait jamais vue dans la création: je ne
puis pas t’aimer, je te déteste. Pourquoi reviens-je à toi,
pour la millième fois, vers tes bras amis, qui
s’entr’ouvrent, pour caresser mon front brûlant, qui voit
disparaître la fièvre à leur contact! Je ne connais pas ta
destinée cachée; tout ce qui te concerne m’intéresse.
Dis-moi donc si tu es la demeure du prince des ténèbres.
Dis-le moi… dis-le moi, océan (à moi seul, pour ne pas
attrister ceux qui n’ont encore connu que les illusions), et
si le souffle de Satan crée les tempêtes qui soulèvent tes
eaux salées jusqu’aux nuages. Il faut que tu me le dises,
parce que je me réjouirais de savoir l’enfer si près de
l’homme. Je veux que celle-ci soit la dernière strophe de
mon invocation. Par conséquent, une seule fois encore, je
veux te saluer et te faire mes adieux ! Vieil océan, aux
vagues de cristal… Mes yeux se mouillent de larmes
abondantes, et je n’ai pas la force de poursuivre; car, je
sens que le moment venu de revenir parmi les hommes, à
l’aspect brutal; mais… courage! Faisons un grand effort,
et accomplissons, avec le sentiment du devoir, notre
destinée sur cette terre. Je te salue, vieil océan! »
En souvenir de JL Godard, je ne sais plus dans quel film.
Bon, tout le monde sait de qui c’est, non?
Merci à tous. Il est amusant qu’une initiative de ce genre soit vécue par certains comme une phase de fainéantise ou quelque chose du genre « pas le temps ». Donner sa place fait partie des initiatives qui devraient se développer sur le net.
J’aime être surpris, étonné, lire ou découvrir quelque chose que je n’attendais pas. J’aurai plaisir dans l’avenir à recevoir des contributions de vous (par mail) et à les publier si je les trouve intéressantes et publiables. Je le faisais souvent chez 20 minutes sur feu le DEL. Ne sous-estimez pas ma capacité à m’intéresser aux autres. Éditeur j’ai été. Éditeur je reste… Je vais lire tout ce qui est dans les réclamations et j’y reviendrai… Dans la soirée.
La page est couleur saumon comme celles du Figarp spécial emploi.
C’est pas parce qu’on n’a rien à dire qu’il faut fermer sa gueule!
FUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUUCK!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!………………………………………………………..
écran total
les premiers soleils sont perfides….vous avez raison de restez à l’ombre on est jamais assez prudent…
Plus sérieusement, »
solidarité avec la minute » de silence pour la liberté de la presse et les journalistes condamnés pour longtemps ou pour l’éternité à la page blanche…..
?????
essai captcha
« Écoute, avec confiance et sans crainte ; tu es avec des républicains communistes et par conséquent tu commences à vivre sous l’ère de l’égalité. Ils seront tes frères si tu es fidèle à ton serment, mais tu seras à jamais perdu si tu le trahis. Ils l’ont juré tous comme tu viens de le jurer toi-même. Écoute toujours avec la plus grande attention : la communauté, c’est la véritable république: travail commun, éducation, propriétés, jouissances communes ; c’est le soleil symbole de l’égalité, c’est la foi nouvelle pour laquelle nous avons tous juré de mourir ! Nous ne connaissons ni barrières, ni frontières, ni patrie ; tous les com- munistes sont nos frères, les aristocrates, nos ennemis. Maintenant, si tu crains les cachots, la torture, la mort, si tu sens ton courage faillir, retire-toi ; pour entrer dans nos rangs, il faut affronter tout cela : une fois le serment prêté, ta vie nous appartient, tu es engagé sur ta tête et sur celle de celui qui t’amène pour le reste de tes jours. Réfléchis et réponds. »
On savait vivre ne 1839. Que vive l’égalité.
Sorry, on savait vivre en 1839.
47 commentaires pour 1001 clients. Les commentaires sont rares et chers donc. Caresse les.
yvanchteglov,
Lorsque l’on ne possède rien d’autre que sa dignité on partage tout le reste.
Une page blanche.
Une page blanche, par Guy Birenbaum
http://www.youtube.com/watch?v=6lfr3vuOg9k&feature=youtube_gdata
Merci à tous. Je vous lis tous les jours et j’en apprends donc aussi tous les jours.
Il y a dans le web le meilleur comme le pire! Essayons de d’en retenir que le meilleur!
Derrière chaque journaliste, il y a un homme ou une femme, ne l’oublions pas! Si beaucoup ont cédé à la culture du chiffre, de l’argent, beaucoup aussi se battent pour nous!
C’est bien d’un éditeur de proposer le supplice de la page blanche à ses lecteurs.
Nous résisterons au blanc de toutes nos forces et au retour de la neige en ce mois de Mai.
😉
Pendant ce temps là, en Sibérie.
Je suis dépourvu de foi et ne puis donc être heureux, car un homme qui risque de craindre que sa vie soit une errance absurde vers une mort certaine ne peut être heureux. Je n’ai reçu en héritage ni dieu, ni point fixe sur la terre d’où je puisse attirer l’attention d’un dieu : on ne m’a pas non plus légué la fureur bien déguisée du sceptique, les ruses de Sioux du rationaliste ou la candeur ardente de l’athée. Je n’ose donc jeter la pierre ni à celle qui croit en des choses qui ne m’inspirent que le doute, ni à celui qui cultive son doute comme si celui-ci n’était pas, lui aussi, entouré de ténèbres. Cette pierre m’atteindrait moi-même car je suis bien certain d’une chose : le besoin de consolation que connaît l’être humain est impossible à rassasier.
En ce qui me concerne, je traque la consolation comme le chasseur traque le gibier. Partout où je crois l’apercevoir dans la forêt, je tire. Souvent je n’atteins que le vide mais, une fois de temps en temps, une proie tombe à mes pieds. Et, comme je sais que la consolation ne dure que le temps d’un souffle de vent dans la cime d’un arbre, je me dépêche de m’emparer de ma victime.
Qu’ai-je alors entre mes bras ?
Puisque je suis solitaire : une femme aimée ou un compagnon de voyage malheureux. Puisque je suis poète : un arc de mots que je ressens de la joie et de l’effroi à bander. Puisque je suis prisonnier : un aperçu soudain de la liberté. Puisque je suis menacé par la mort : un animal vivant et bien chaud, un cœur qui bat de façon sarcastique. Puisque je suis menacé par la mer : un récif de granit bien dur.
Mais il y a aussi des consolations qui viennent à moi sans y être conviées et qui remplissent ma chambre de chuchotements odieux : Je suis ton plaisir – aime-les tous ! Je suis ton talent – fais-en aussi mauvais usage que de toi-même ! Je suis ton désir de jouissance – seuls vivent les gourmets ! Je suis ta solitude – méprise les hommes ! Je suis ton aspiration à la mort – alors tranche !
Le fil du rasoir est bien étroit. Je vois ma vie menacée par deux périls : par les bouches avides de la gourmandise, de l’autre par l’amertume de l’avarice qui se nourrit d’elle-même. Mais je tiens à refuser de choisir entre l’orgie et l’ascèse, même si je dois pour cela subir le supplice du gril de mes désirs. Pour moi, il ne suffit pas de savoir que, puisque nous ne sommes pas libres de nos actes, tout est excusable. Ce que je cherche, ce n’est pas une excuse à ma vie mais exactement le contraire d’une excuse : le pardon. L’idée me vient finalement que toute consolation ne prenant pas en compte ma liberté est trompeuse, qu’elle n’est que l’image réfléchie de mon désespoir. En effet, lorsque mon désespoir me dit : Perds confiance, car chaque jour n’est qu’une trêve entre deux nuits, la fausse consolation me crie : Espère, car chaque nuit n’est qu’une trêve entre deux jours.
Mais l’humanité n’a que faire d’une consolation en forme de mot d’esprit : elle a besoin d’une consolation qui illumine. Et celui qui souhaite devenir mauvais, c’est-à-dire devenir un homme qui agisse comme si toutes les actions étaient défendables, doit au moins avoir la bonté de le remarquer lorsqu’il y parvient.
Personne ne peut énumérer tous les cas où la consolation est une nécessité. Personne ne sait quand tombera le crépuscule et la vie n’est pas un problème qui puisse être résolu en divisant la lumière par l’obscurité et les jours par les nuits, c’est un voyage imprévisible entre des lieux qui n’existent pas. Je peux, par exemple, marcher sur le rivage et ressentir tout à coup le défi effroyable que l’éternité lance à mon existence dans le mouvement perpétuel de la mer et dans la fuite perpétuelle du vent. Que devient alors le temps, si ce n’est une consolation pour le fait que rien de ce qui est humain ne dure – et quelle misérable consolation, qui n’enrichit que les Suisses !
Je peux rester assis devant un feu dans la pièce la moins exposée de toutes au danger et sentir soudain la mort me cerner. Elle se trouve dans le feu, dans tous les objets pointus qui m’entourent, dans le poids du toit et dans la masse des murs, elle se trouve dans l’eau, dans la neige, dans la chaleur et dans mon sang. Que devient alors le sentiment humain de sécurité si ce n’est une consolation pour le fait que la mort est ce qu’il y a de plus proche de la vie – et quelle misérable consolation, qui ne fait que nous rappeler ce qu’elle veut nous faire oublier !
Je peux remplir toutes mes pages blanches avec les plus belles combinaisons de mots que puisse imaginer mon cerveau. Etant donné que je cherche à m’assurer que ma vie n’est pas absurde et que je ne suis pas seul sur la terre, je rassemble tous ces mots en un livre et je l’offre au monde. En retour, celui-ci me donne la richesse, la gloire et le silence. Mais que puis-je bien faire de cet argent et quel plaisir puis-je prendre à contribuer au progrès de la littérature – je ne désire que ce que je n’aurai pas : confirmation de ce que mes mots ont touché le cœur du monde. Que devient alors mon talent si ce n’est une consolation pour le fait que je suis seul – mais quelle épouvantable consolation, qui me fait simplement ressentir ma solitude cinq fois plus fort !
Je peux voir la liberté incarnée dans un animal qui traverse rapidement une clairière et entendre une voix qui chuchote : Vis simplement, prends ce que tu désires et n’aie pas peur des lois ! Mais qu’est-ce que ce bon conseil si ce n’est une consolation pour le fait que la liberté n’existe pas – et quelle impitoyable consolation pour celui qui s’avise que l’être humain doit mettre des millions d’années à devenir un lézard !
Pour finir, je peux m’apercevoir que cette terre est une fosse commune dans laquelle le roi Salomon, Ophélie et Himmler reposent côte à côte. Je peux en conclure que le bourreau et la malheureuse jouissent de la même mort que le sage, et que la mort peut nous faire l’effet d’une consolation pour une vie manquée. Mais quelle atroce consolation pour celui qui voudrait voir dans la vie une consolation pour la mort !
Je ne possède pas de philosophie dans laquelle je puisse me mouvoir comme le poisson dans l’eau ou l’oiseau dans le ciel. Tout ce que je possède est un duel, et ce duel se livre à chaque minute de ma vie entre les fausses consolations, qui ne font qu’accroître mon impuissance et rendre plus profond mon désespoir, et les vraies, qui me mènent vers une libération temporaire. Je devrais peut-être dire : la vraie car, à la vérité, il n’existe pour moi qu’une seule consolation qui soit réelle, celle qui me dit que je suis un homme libre, un individu inviolable, un être souverain à l’intérieur de ses limites.
Mais la liberté commence par l’esclavage et la souveraineté par la dépendance. Le signe le plus certain de ma servitude est ma peur de vivre. Le signe définitif de ma liberté est le fait que ma peur laisse la place à la joie tranquille de l’indépendance. On dirait que j’ai besoin de la dépendance pour pouvoir finalement connaître la consolation d’être un homme libre, et c’est certainement vrai. A la lumière de mes actes, je m’aperçois que toute ma vie semble n’avoir eu pour but que de faire mon propre malheur. Ce qui devrait m’apporter la liberté m’apporte l’esclavage et les pierres en guise de pain.
Les autres hommes ont d’autres maîtres. En ce qui me concerne, mon talent me rend esclave au point de pas oser l’employer, de peur de l’avoir perdu. De plus, je suis tellement esclave de mon nom que j’ose à peine écrire une ligne, de peur de lui nuire. Et, lorsque la dépression arrive finalement, je suis aussi son esclave. Mon plus grand désir est de la retenir, mon plus grand plaisir est de sentir que tout ce que je valais résidait dans ce que je crois avoir perdu : la capacité de créer de la beauté à partir de mon désespoir, de mon dégoût et de mes faiblesses. Avec une joie amère, je désire voir mes maisons tomber en ruine et me voir moi-même enseveli sous la neige de l’oubli. Mais la dépression est une poupée russe et, dans la dernière poupée, se trouvent un couteau, une lame de rasoir, un poison, une eau profonde et un saut dans un grand trou. Je finis par devenir l’esclave de tous ces instruments de mort. Ils me suivent comme des chiens, à moins que le chien, ce ne soit moi. Et il me semble comprendre que le suicide est la seule preuve de la liberté humaine.
Mais, venant d’une direction que je ne soupçonne pas encore, voici que s’approche le miracle de la libération. Cela peut se produire sur le rivage, et la même éternité qui, tout à l’heure, suscitait mon effroi est maintenant le témoin de mon accession à la liberté. En quoi consiste donc ce miracle ? Tout simplement dans la découverte soudaine que personne, aucune puissance, aucun être humain, n’a le droit d’énoncer envers moi des exigences telles que mon désir de vivre vienne à s’étioler. Car si ce désir n’existe pas, qu’est-ce qui peut alors exister ?
Puisque je suis au bord de la mer, je peux apprendre de la mer. Personne n’a le droit d’exiger de la mer qu’elle porte tous les bateaux, ou du vent qu’il gonfle perpétuellement toutes les voiles. De même, personne n’a le droit d’exiger de moi que ma vie consiste à être prisonnier de certaines fonctions. Pour moi, ce n’est pas le devoir avant tout mais : la vie avant tout. Tout comme les autres hommes, je dois avoir droit à des moments où je puisse faire un pas de côté et sentir que je ne suis pas seulement une partie de cette masse que l’on appelle la population du globe, mais aussi une unité autonome.
Ce n’est qu’en un tel instant que je peux être libre vis-à-vis de tous les faits de la vie qui, auparavant, ont causé mon désespoir. Je peux reconnaître que la mer et le vent ne manqueront pas de me survivre et que l’éternité se soucie peu de moi. Mais qui me demande de me soucier de l’éternité ? Ma vie n’est courte que si je la place sur le billot du temps. Les possibilités de ma vie ne sont limitées que si je compte le nombre de mots ou le nombre de livres auxquels j’aurai le temps de donner le jour avant de mourir. Mais qui me demande de compter ? Le temps n’est pas l’étalon qui convient à la vie. Au fond, le temps est un instrument de mesure sans valeur car il n’atteint que les ouvrages avancés de ma vie.
Mais tout ce qui m’arrive d’important et tout ce qui donne à ma vie son merveilleux contenu : la rencontre avec un être aimé, une caresse sur la peau, une aide au moment critique, le spectacle du clair de lune, une promenade en mer à la voile, la joie que l’on donne à un enfant, le frisson devant la beauté, tout cela se déroule totalement en dehors du temps. Car peu importe que je rencontre la beauté l’espace d’une seconde ou l’espace de cent ans. Non seulement la félicité se situe en marge du temps mais elle nie toute relation entre celui-ci et la vie.
Je soulève donc de mes épaules le fardeau du temps et, par la même occasion, celui des performances que l’on exige de moi. Ma vie n’est pas quelque chose que l’on doive mesurer. Ni le saut du cabri ni le lever du soleil ne sont des performances. Une vie humaine n’est pas non plus une performance, mais quelque chose qui grandit et cherche à atteindre la perfection. Et ce qui est parfait n’accomplit pas de performance : ce qui est parfait œuvre en état de repos. Il est absurde de prétendre que la mer soit faite pour porter des armadas et des dauphins. Certes, elle le fait – mais en conservant sa liberté. Il est également absurde de prétendre que l’homme soit fait pour autre chose que pour vivre. Certes, il approvisionne des machines et il écrit des livres, mais il pourrait tout aussi bien faire autre chose. L’important est qu’il fasse ce qu’il fait en toute liberté et en pleine conscience de ce que, comme tout autre détail de la création, il est une fin en soi. Il repose en lui-même comme une pierre sur le sable.
Je peux même m’affranchir du pouvoir de la mort. Il est vrai que je ne peux me libérer de l’idée que la mort marche sur mes talons et encore moins nier sa réalité. Mais je peux réduire à néant la menace qu’elle constitue en me dispensant d’accrocher ma vie à des points d’appui aussi précaires que le temps et la gloire.
Par contre, il n’est pas en mon pouvoir de rester perpétuellement tourné vers la mer et de comparer sa liberté avec la mienne. Le moment arrivera où je devrai me retourner vers la terre et faire face aux organisateurs de l’oppression dont je suis victime. Ce que je serai alors contraint de reconnaître, c’est que l’homme a donné à sa vie des formes qui, au moins en apparence, sont plus fortes que lui. Même avec ma liberté toute récente je ne puis les briser, je ne puis que soupirer sous leur poids. Par contre, parmi les exigences qui pèsent sur l’homme, je peux voir lesquelles sont absurdes et lesquelles sont inéluctables. Selon moi, une sorte de liberté est perdue pour toujours ou pour longtemps. C’est la liberté qui vient de la capacité de posséder son propre élément. Le poisson possède le sien, de même que l’oiseau et que l’animal terrestre. Thoreau avait encore la forêt de Walden – mais où est maintenant la forêt où l’être humain puisse prouver qu’il est possible de vivre en liberté en dehors des formes figées de la société ?
Je suis obligé de répondre : nulle part. Si je veux vivre libre, il faut pour l’instant que je le fasse à l’intérieur de ces formes. Le monde est donc plus fort que moi. A son pouvoir je n’ai rien à opposer que moi-même – mais, d’un autre côté, c’est considérable. Car, tant que je ne me laisse pas écraser par le nombre, je suis moi aussi une puissance. Et mon pouvoir est redoutable tant que je puis opposer la force de mes mots à celle du monde, car celui qui construit des prisons s’exprime moins bien que celui qui bâtit la liberté. Mais ma puissance ne connaîtra plus de bornes le jour où je n’aurai plus que le silence pour défendre mon inviolabilité, car aucune hache ne peut avoir de prise sur le silence vivant.
Telle est ma seule consolation. Je sais que les rechutes dans le désespoir seront nombreuses et profondes, mais le souvenir du miracle de la libération me porte comme une aile vers un but qui me donne le vertige : une consolation qui soit plus qu’une consolation et plus grande qu’une philosophie, c’est-à-dire une raison de vivre.
Stig Dagerman [« Notre Besoin De Consolation Est Impossible à Rassasier »]
avec un peu de retard
http://www.lepost.fr/article/2009/06/16/1580956_une-page-blanche-un-concours-une-exposition-et-voila-le-resultat.html
j’ai essayé sur votre billet, mais j’ai cassé mon écran. Vous avez un bon avocat?